50 NUANCES DE VIDE
10/02/17 20:49 Classé dans :
SociétéAlors ? Que valent-elles ces fameuses nuances érotiques qui continuent d'exploser le box-office ? Je me lance lance dans la peinture...

Le livre de Erika Leonard James est sans conteste un véritable succès mondial. Il fut présenté comme le titre phare d'une nouvelle forme de roman étant à l'érotisme ce que Harlequin — les éditions — est à la littérature... Roman de gare, agrémenté de passages érotiques destinés principalement à la ménagère américaine moyenne — et visiblement du monde entier aujourd'hui — et de moins de cinquante ans — l'honneur est sauf... —, les plus âgées n'étant pas officiellement la cible de cet objet du désir pas si obscur... pourtant écrit par une jeunesse de … cinquante ans.
L'histoire, en effet, pourrait tout à fait trouver sa place au sein des éditions Harlequin déjà évoquées plus haut. Anastasia est jeune, jolie et vierge — tant qu'à faire... — quand elle rencontre un séduisant — devinez quoi ? — homme d'affaires, bien sûr ! Vous n'imaginiez tout de même pas qu'il allait être sans domicile fixe... Bref, le prélude du livre ressort tous les clichés à l'eau de rose périmée, maintes fois utilisés, dont le plus célèbre exemple reste le film Pretty woman de Gary Marshall. Mais, le beau monsieur est un sacré coquin qui va entrainer la belle Anastasia dans un parcours initiatique sadomasochiste... Ah ! Quand même...
Oui, je sais, là encore rien de bien nouveau, on pense immédiatement à Histoire d'Ô, dont on sait aujourd'hui qu'il fut écrit par Dominique Aury, secrétaire de la Nouvelle Revue Française pour séduire l'homme de sa vie... Elle avouera, bien plus tard, qu'elle n'était pas jeune, qu'elle n'était pas jolie et qu'il lui fallut alors bien trouver d'autres armes...
Mais, revenons à Monsieur Grey... Disons tout de suite, que si la lecture de l'ensemble n'est pas forcément désagréable à lire, quelques passages auraient sans doute mérité d'être réécrits. Par exemple et pris au hasard, le chapitre 10 commence par ce monument de bon goût :
Il se retire brusquement de moi, ce qui m’arrache une grimace de douleur, et s’assied sur le lit pour jeter son préservatif usagé dans la corbeille.
— Allez, on s’habille : je vais te présenter à ma mère.
Je sais, c'est facile, mais avouez que vous avez souri. Imaginez la même scène transposée au cinéma, interprétée par un Richard Gere couvert de sueur, retirant sa capote tout aussi suintante, mais de semence, elle, la balançant dans la corbeille — dont on se demande fébrilement ce qu'elle fait là — puis annonçant à Julia, encore poings et pieds liés, qu'il va la présenter à sa mère...
Le plus drôle dans l'histoire reste que Cinquante nuances de Grey est présenté par son auteure — relayée en cela par son éditeur — comme un livre d'amour avant tout. Erika Leonard James rappelant que les livres de Sade ou Histoire d'Ô ne parlent pas d'amour... Sans doute vrai pour le premier, encore que... Quant à Histoire d'Ô, elle ne l'a probablement jamais ouvert et s'est contentée de voir la médiocre adaptation cinématographique de Just Jaeckin, sortie en 1975 en flirtant sur la vague du succès d'Emmanuelle, son précédent film qui fut une véritable révolution. Et c'est bien dommage, cela lui aurait appris comment écrire un bon livre...
Car, bon Gray, mal Gray — pardon, je n'ai pas pu résister —, ce livre est bougrement mal écrit. Rien d'étonnant lorsque l'on connait la motivation première de James qui était de créer un Twilight — le roman de vampires à l'eau de rose pour adolescentes débiles — en y plaçant des scènes érotiques... Pour le contenu, le pari est réussi, en effet, l'histoire est tout aussi passionnante que les très peu affriolantes aventures des Dracula de pacotille de Twilight. Concernant l'érotisme, on repassera. Vous n'y trouverez qu'une transfiguration des plus mauvais films pornographiques américains — disponibles chez l'éditeur Marc Dorcel —, extrait...
Il m’enlace de nouveau pour guider mes mains, reprenant sa caresse sensuelle de mon sexe, de mon clitoris.
James a bien raison de préciser que le sexe féminin est le clitoris, vu l'âge mental de ses lectrices, elles auraient pu imaginer qu'il s'agissait-là de son anus...
Les poils de sa poitrine me chatouillent le dos, son érection s’imprime contre mes fesses.
C'est chaud, non ? Eh bien, vous n'avez encore rien vu, nan, car après avoir copieusement imprimé sa bite contre le cul d'Anastasia, le milliardaire va lui demander depuis quand elle a ses règles — quelle délicatesse ces amerloques —, Heu... hier, répond l'ingénue un peu gênée, mais pas trop.
Et voilà que notre richissime étalon se met à pilonner notre pauvre Anastasia qui n'en peux plus de recevoir les coups de son amant dans son clitoris — donc... — ensanglanté... Bon appétit...
Le chapitre 21 est assez cocasse, puisqu'il utilise le mail comme narration, mais ce qui pourrait être une bonne idée, se révèle d'un ennui mortel. L'héroïne signant tantôt par Ana, puis par Ton Ana ou bien encore par Votre Ana... Votre nunuche, oui !
Bon, allez, à la fin, la morale est sauve car Nunuche — pardon, je veux dire Ana — quitte Monsieur Grey... Bon, elle le fait dans la douleur — eh oui... — car la vraie morale du livre est que la souffrance d'une rupture est bien plus importante, puissante et cruelle que celles infligées par Monsieur Grey — dont on cherchera longtemps les nuances dans ce vide abyssal —, pauvre Ana...
Bon, elle retourne sans doute se faire fouetter le cul dans le prochain volume de la série qui en compte trois... mais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je m'abstiendrai... Tags: E.L.James, 50 nuances de gris